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DOCUMENTS - Arts - Louis Riel Ode 1883 FR


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Ode - Le peuple Métis- Canadien- Français.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

J’­aime sans mesure et j’admire

Les Métis- Canadien- Français :

Ce peuple nouveau, qui se mire

Déjà dans de brillants succès.

 

Il a fait connaitre sa gloire

Aux indiens du Minnesota.

Il a toujours gagné victoire

Sur les tribus du Dakota.

 

Les montagnes et les prairies

Du Nord- Ouest ont mille fois

Incliné leurs herbes fleuries

Au souvenir de ses exploits.

 

Les jolis chemins de charrettes

Nombreuse autour de Régina

Montrent les routes qu’il a faites

Jusqu’au loin dans le Montana.

 

Sa demeure humble, hospitalière

A sauvé beaucoup d’étrangers.

Et sa haute valeur guerrière

A reculé bien des dangers.

 

Ce peuple est néanmoins paisible.

Mais les sangs qu’il a sont guerriers.

Bien conduit il devient terrible.

Il lui faut alors des lauriers.

 

Le Manitoba si précoce

Est grand, parce qu’il l’a fondé

Sous le beau frein du Sacerdoce

Qui l’a toujours si bien guidé,

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Le Métis comprend que l’église

Est Reine à la tête de tout;

Que du ciel étant la commise

Ses œuvres seules restent debout.

 

Le Métis est le porte- enseigne

D’un droit qu’on a désétabli;

Du droit naturel qu’on dédaigne

Et qu’on met partout en oubli.

 

Le droit naturel est l’essence

Du bon sens des transactions.

Principe de toute alliance

Il en a les fondations.

 

Métis! Aimons bien la droiture.

Tenons-nous-y résolument.

Montrons le droit dans sa nature

Sans art, sans détour, simplement.

 

Et nous ferons un bien immense

À toute la société

Qui là-dessus tombe en démence.

Le droit seul rend la liberté.

 

Vivons à la façon normale

De l’homme à l’état primitif.

Plus d’une vertu sociale

Règne en nous au superlatif

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Fuyons les idées arrogantes.

Soyons le peuple tout ainsi

Fuyons les mœurs extravagantes,

Montrons que nous sommes d’ici.

 

Nous vendons, il est vrai, nos terres.

Assurément cela nous nuit.

Mais les principes salutaires

Que nous avons, porteront fruit

 

Nos bons principes nous font vivre

En dépit de nos assassins.

Le bon droit que nous savons suivre

Vaincra tous les mauvais desseins

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Si le trait d’union se place

Entre Métis et Canadien;

Assuré, l’une et l’autre race

N’en sera que plus apte au bien.

 

Car je trouve que l’une abonde

En vertus que l’autre n’a pas.

Tandis qu’autrement la seconde

A sur la première le pas.

 

Le canadien français possède

La connaissance du pouvoir.

C’est la cause du bien qu’il plaide.

Il vise à ce qu’il peut avoir.

 

Durant sa longue expérience

Sous le beau sceptre anglo-saxon.

Il étudie en conscience

Plus d’une savante leçon.

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Il sait fort bien que la Puissance

Ne cherche qu’à l’anéantir.

Il combat avec réticence

Juste assez pour se garantir.

 

Les canadiens français sont fermes.

Il faut qu’ils soient d’un beau moral

Pour ainsi lutter de bons termes

Avec l’anglais en général.

 

Il faut qu’ils soient bons diplomates

Ces apprivoiseurs d’Albion

Qui savent enchainer les pattes

De l’Unicorne et du Lion

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Métis, la grande indifférence

Que nous tenons du sang indien

Se rendant jusques à l’outrance;

Et tout de même, Canadien

 

À force d’user de finesse

Vis-à-vis de nos ennemis,

Nous voilà pris d’une faiblesse.

Nous faisons trop de compromis.

 

Pour nous rendre plus énergiques

Dieu nous fait venir d’outre-mer

Le meilleur de tous les toniques.

Cordial qui n’a rien d’amer,

 

L’Esprit français qui nous stimule

Est notre grand fortifiant.

Écoutons-le quand il formule

Nos droits en les simplifiant.

 

Soyons fiers quand il les proclame,

En se jouant, sur tous les tons;

Et qu’il les discute avec âme

En termes que nous adoptons.

 

Le français de la France ancienne

Aime à fond le droit positif.

Sa langue lucide et chrétienne

N’en parle qu’à l’impératif.

 

Le bon français est plein de zèle.

Gardien généreux et vaillant

Des droits de la Ville Éternelle,

Ne faut-il pas qu’il soit bouillant?

 

Dieu lui permet plus de hardiesse

Peut-être qu’aux autres mortels.

Il est né pour emporter pièce,

Pour tenir debout les autels.

 

Le bon français a de l’empire

Jusque dans ses moindres discours.

Il tend sans cesse à reconstruire

Sa franchise est d’un grand secours.

 

La politesse enchanteresse

Encourage partout les bous.

Elle tranquillise et redresse

Un peu même les furibonds.

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Dotons notre langue française

De mots étrangers qui soient beaux;

Afui que plus riche elle plaise

Plus eu ces parages nouveaux.

 

Empruntons aux langues sauvages

Un certain choix d’expressions;

Quelques-unes de leurs images,

Quelques belles locutions.

 

Ces nouveautés rendront plus forte

La langue de nos chers aïeux.

Embellissons-la de la sorte

Suivant le gout de notre mieux.

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Métis et Canadiens ensemble

Français, si nos trois éléments

L’amalgament brui, il me semble

Que nous serons un jour plus grands.

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Les trois feuilles du trèffle peuvent

Exister sur le même pied.

Toutes les trois, jolies, se meuvent

À l’unisson, comme il leur sied.

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Le clergé qui nous édifie

Nous unira bien sûrement,

Comme le trèffle identifie

Ses trois fleurs admirablement.

 

Son grand cœur prend beaucoup de peine

À consolider, je le sais,

La nation manitobaine

Des Métis-Canadiens-Français.

 

 

Louis Riel.


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